Dispositif méconnu mais bien réel, la mobilité inter-entreprises permet de recruter de manière innovante, de faire évoluer et d’adapter les besoins en compétences pour l’entreprise et pour le salarié, de tester un job ou d’améliorer son employabilité. Ce dispositif est totalement encadré par la loi.
Mais pourquoi utiliser ce dispositif ? On constate 3 principaux problèmes sur le marché du travail, à savoir la pénurie de candidatures qualifiées, l’insécurité pour les salariés en CDI, et la manque de flexibilité des coûts pour les entreprises.
La mobilité inter-entreprises peut être définitive (le salarié quitte définitivement l’entreprise à l’issue de sa période d’immersion) ou temporaire (le salarié retourne dans l’entreprise d’accueil à l’issue de sa période d’immersion).
Dans le contexte actuel d’économie ouverte (open innovation), le prêt de main d’œuvre temporaire (loi Cherpion en 2011) est une des solutions pour améliorer les collaborations entre grands groupes/start up et freiner l’obsolescence des compétences. Reste à trouver le bon modèle économique et renforcer la pédagogie pour donner un coup de fouet à la mobilité inter-entreprises.
Dans les débats organisés pour la réforme du code du travail, le gouvernement a donné quelques signes encourageants pour installer ce dispositif dans le paysage économique.
Le Pôle de compétence numérique (plateforme dédiée au RH numérique créée par l’agence de développement économique du territoire Grand Paris Seine Ouest) a été pionnier dans la mise en place d’un laboratoire dédié à la mobilité inter-entreprises. Nous avons, en effet, construit la première solution de mobilité avec Apitalent et le soutien de l’État. Apitalent vole aujourd’hui de ses propres ailes.
La mobilité : rester compétitif pour le salarié et l’entreprise
Une restructuration pour une multinationale ? Un carnet de commande en baisse pour une PME ?
Il est fréquent d’envisager de se séparer de ses collaborateurs. Et pourtant, il existe un dispositif qui peut éviter un licenciement : la mobilité inter-entreprises. Gage de flexibilité pour le manager, sécurité du parcours du salarié, cet outil utilisé à bon escient peut être une formidable opportunité pour le salarié de tester un nouveau job dans une entreprise d’accueil et pour l’entreprise prêteuse de soulager sa masse salariale temporairement ou définitivement. Parallèlement, dans l’écosystème numérique, le prêt temporaire de main d’œuvre est un recours en cas de période d’inter-contrat ou tout simplement pour acquérir de nouvelles méthodes de travail. Le Pôle de compétence numérique a expérimenté ce dispositif avec des partenaires comme HP et Michelin Travel Partner.
Le salarié est en CDI, il ne connaît pas de suspension de son contrat de travail, il est rémunéré par son entreprise d’origine tout en travaillant pour une durée déterminée pour une entreprise d’accueil qui rembourse intégralement les salaires et les charges de l’entreprise d’origine. Les entreprises ne sont pas perdantes, bien au contraire, cela leur permet de recruter et d’adapter leurs ressources humaines à leurs activités. Aujourd’hui, on découvre une véritable volonté de casser les frontières traditionnelles dans les entreprises. Une réduction du coût humain et une manière d’absorber les surcharges temporaires de travail !
Dans un monde en pleine mutation, il est important d’aller plus loin dans ce dispositif notamment dans le prêt temporaire de main d’œuvre. L’économie collaborative a fait naître de nouveaux besoins non pris en compte dans le caractère juridique des textes.
Vous pouvez saisir de nouvelles opportunités professionnelles et gérer votre carrière de façon pro-active. Une chose est sûre : un cadre senior n’a jamais été aussi demandé pour une entreprise NTIC en développement et la demande n’a jamais été aussi forte pour un cadre de gagner en agilité.
Comment intégrer la mobilité inter-entreprises dans une stratégie de formation ?
Les débats portés par la réforme du code du travail ont mis en avant la difficile équation de réussir une mobilité salariée d’une entreprise prêteuse à une entreprise d’accueil. « Fidèles à la loi », les acteurs de la mobilité ont adopté un modèle où les salaires chargés et frais professionnels étaient pris en charge par l’entreprise d’accueil (le plus souvent une petite structure comme dans le cas de collaborations grand groupe/start-up). Comment dès lors, imaginer une start-up prendre en charge un salaire de cadre de grand groupe alors qu’elle-même dispose d’un budget à minima pour payer ses propres salariés ? Face à l’utilisation qu’on peut faire de la mobilité, il est donc essentiel de simplifier le cadre législatif de ce dispositif et de changer de modèle pour réduire les coûts.
Autre objectif : revoir la politique formation. La formation demeure un des meilleurs remparts contre le chômage. Les points de vue changent rapidement, les cultures d’entreprise aussi. L’accompagnement au changement reste une problématique forte d’autant plus que les nouvelles générations de salariés sont très mobiles et aspirent à la diversité.
A l’heure où les questions se posent sur l’orientation et les moyens alloués à la formation, le salarié doit percevoir la mobilité comme une chance d’acquérir de nouvelles compétences. Réciproquement, la mobilité doit permettre aux entreprises de gagner en compétitivité à travers la montée en compétence d’un salarié lors d’une immersion de courte ou moyenne durée dans une autre entreprise. Les retours d’expériences des salariés en mobilité nous démontrent qu’ils sont revenus plus « aguerris » et avec de nouvelles méthodes de travail transmises pendant leur période de détachement. Un véritable enrichissement personnel. Si le bénéfice est bien réel pour toutes les parties, il convient de remédier aux coûts supportés par l’entreprise d’accueil. Un coût qui, au vu des bénéfices, pourrait être gratuit à l’instar du mécénat de compétences pour les associations ou pris en charge « pour une partie » par le budget formation des entreprises. Les Opca de la filière numérique doivent se questionner sur ce nouveau modèle car la mobilité est particulièrement adaptée à ce secteur.
Dans un monde du travail qui se métamorphose (bousculement des statuts, influence du numérique, nouvelles méthodes de management…), les salariés doivent être invités par leur manager à se former en continu. De multiples outils existent (webinar, e-learning) mais rien ne vaut la mise en situation pour pouvoir se challenger, partager des best practice et gagner en expertise.
Conclusion : Élargir la base d’utilisation de la mobilité inter-entreprises
Aujourd’hui, les prêts de main d’œuvre les plus fréquents se réalisent dans le cadre de collaborations grand groupes/start up. Or, il faudrait que les PME puissent recourir plus souvent à la mobilité entre elles pour s’adapter à un contexte économique instable. Les fluctuations d’activité ralentissent les embauches en CDI, surtout dans les six premières années d’activité. Simplifier les modalités de prêt d’un salarié (gratuit, payant, pris en charge) tout en incluant un vrai dialogue avec lui est incontournable.